Premier bilan de l’action « Kéisecker » – un an après son lancement

La bonne nouvelle en premier lieu: oui, le « Kéisecker » est toujours présente au Luxembourg! Au total, non moins de 165 découvertes de hérissons nous ont été rapportées. De la première observation – qui remonte au 8 mars 2019 – jusqu’à la dernière découverte en date du 26 octobre 2019, nous avons pu comptabiliser 144 informations exploitables, qui nous sont parvenues ou bien par courriel, ou bien par encodage direct via iNaturalist (dont 40% avec photo à l’appui!).  Aussi, l‘évolution des observations donne une image fidèle reflétant la période active du hérisson tout au long de la saison.

Après l’hibernation, le hérisson s’active à nouveau. Les mois de mai et de juin sont les plus laborieux. Surtout pour les femelles, qui – tout au long de la nuit – partent à la recherche de nourriture. A noter que nous n’avons pas pu observer de pic migratoire, qui se produit habituellement en automne, lorsque les hérissons – jeunes et vieux réunis – sont amenés à trouver un lieu de refuge pour l’hiver, respectivement partent à la recherche d’un nouveau territoire. Il serait intéressant de poursuivre l’analyse dans le but de savoir si les premières observations phénologiques au printemps, à la sortie de la période d’hibernation, se vérifient plus tôt, ces dernières années, du fait du changement climatique, …  et de connaître l’état physique des femelles après l’hiver (sachant qu’un hiver doux suscitant des périodes d’éveil leur coûte davantage d’énergie qu’un hiver aux températures glaciales et au sommeil hivernal continu et reposant!).

Le hérisson – victime du trafic routier et du morcellement des paysages

26 hérissons signalés (soit 16%) étaient malheureusement victimes du trafic routier. Un autre animal s’était fait écraser par un train.

Plusieurs observations ont été faites au niveau de la B7 à hauteur de Schieren. Nous devons partir de l’idée que ce triste chiffre d’animaux morts est bien plus important, du fait que bon nombre de gens rechignent devant l’idée de signaler une telle observation, voire de prendre en photo un pauvre hérisson écrasé par un engin, ou encore du fait qu’il était tout simplement trop dangereux de prendre une photo, à titre de preuve, en ce lieu. En tous les cas, les alertes de hérissons aplatis témoignent bien à quel point le morcellement de cette route – et d’autres encore –  s’avère fatal pour le paysage naturel et ses habitants.

Une autre triste nouvelle, preuve photographique à l’appui, nous est parvenue depuis le centre du Luxembourg, où un hibou s’est régalé de la chair de sa proie, ne se laissant aucunement intimider par le manteau de poils piquants de cet infortuné Kéisécker

Variation des taux de présence à travers le Luxembourg

© iNaturalist.org

Grâce aux nombreuses données collectées par les personnes ayant contribué au succès de l’action, une carte très intéressante, identifiant et retraçant la présence du Kéisecker à travers le pays, a pu être réalisée en l’espace d’un an. Un fait qui saute immédiatement aux yeux est celui qu’il n’y a pas d’observation signalée, ni preuve de présence venant de vallées fluviales plus pentues (comme Mamerdall, Äischdall), ou encore de la région nord du GDL, l’Oesling.

La présence du hérisson nous a principalement été signalée dans la partie sud-ouest du pays, ainsi que dans la vallée de l’Alzette (Uelzechtdall). Or, cela ne nous permet pas de conclure a priori à une plus forte présence du Kéisecker dans les régions prémentionnées, qui pourrait simplement résoudre d’une plus forte présence humaine en termes d’habitants ou de fréquentation à ces endroits. La plupart des observations provenaient des localités Luxembourg, Strassen, Dudelange et Schieren.

Mais comme l’intérêt et le nombre de passionnés de nature n’est pas le même à tous les coins du pays, cette répartition inégale est probablement plutôt à mettre en relation avec la densité de la population, respectivement avec la répartition variée des membres engagés du Mouvement Écologique!

Menace de disparition du Kéisécker dans le paysage ouvert

Notre petit ami au manteau de piquants a principalement pu être observé en zone urbaine (villages, villes) dans les jardins et autour des habitations (environ 85%)!  Seulement 12% des hérissons ont été aperçus dans le paysage ouvert (champs, prés) et quelques rares spécimens isolés ont été signalés dans les bois). Pour ce qui est plus précisément des observations faites en zone urbaine, plus de la moitié des présences signalées provenaient de jardins de propriétaires privés, suivies au 2ème rang par l’espace routier (notamment aires de parking) et, au 3ème rang, les parcs publiques (rares cas d‘hérissons isolés). Force est de constater que le paysage ouvert – en proie à une agriculture intensive et une forte utilisation de pesticides, de lisier et d’engrais chimiques – dérobe le hérisson de sa base vitale si essentielle. Même si les champs et les prés sont encore partiellement flanqués de haies en coulisse, les sources de nourriture en termes d’insectes, de limaces etc., y diminuent fortement, laissant notre petit ami insectivore sur sa faim et réduisant ses chances de survie à néant. C’est ainsi que les villes et villages ont gagné le rôle de refuge pour une espèce qui jadis marquait sa présence – régulière et fréquente – dans le paysage ouvert.

Le Kéisécker – petit animal opportuniste

Saisir l’occasion, voilà le maître-mot des hérissons pris en photo qui, à non moins de 12 occasions, se sont délectés de la nourriture pour chats, mise à disposition – parfois même -dans l’idée du « first come, first served ».

Il est intéressant de souligner que 4 personnes ont confirmé et documenté la présence d’un hôte de longue date dans leurs abris à hérisson respectifs.

Les conséquences tragiques induites par les « pièges » (inconscients) menaçant la survie du hérisson dans le jardin ont elles-aussi été signalées et documentées sur iNaturalist.  C’est pourquoi nous vous recommandons vivement de profiter de cette période pour aménager votre jardin de manière à ce qu’il ne renferme plus aucune source de danger pour le Kéisecker. Car un simple escalier non sécurisé, ou encore un étang sans « barrière » protectrice insurmontable, représentent des dangers mortels qui guettent le hérisson qui a pris son quartier dans votre jardin!  Pensez à lui aménager un pont sous forme de panneau de bois, qui lui permet de franchir la cage d’escalier et une pente raide infranchissable autour de l’étang, qui l’empêche de se noyer dans l‘eau. Si votre jardin est entouré d’un grillage (maillage d’acier inoxydable), coupez-y plusieurs trous de 12 x 12 cm qui permettront au hérisson de se déplacer plus loin et à son aise. Sinon le Kéisecker risque d’être pris au piège (coincé dans le grillage) lors de ses promenades nocturnes.

Des tunnels spécifiques pour hérissons peuvent être commandés auprès du Mouvement Écologique. (Shop)

L‘action Kéisécker en 2020: quelles sont les prochaines étapes?

La première observation d’un hérisson en cette année 2020 nous a été signalée le 12 mars dernier. Le signal d’envoi pour une nouvelle étape de notre action Kéisecker est ainsi donné! Tous les amoureux de la nature et amis des hérissons sont relancés et invités à nous avertir dès lors qu’ils auront découvert ce petit animal sympathique au manteau de piquants. Les informations collectées au cours de la deuxième (et dernière) année du projet nous permettront – espérons-le! – de compléter les quelques vides qui demeurent sur notre carte d’identification. Et surtout: signalez-nous également les découvertes de spécimens qui ont trouvé la mort. Il nous importe de rassembler toutes les données/images provenant surtout de ces zones du pays dont nous ne disposons pas encore de preuves d’une présence des hérissons! Le Kéisecker a-t-il vraiment disparu de la région de l’Oesling? Nous avons pour objectif en 2020 de découvrir si la réponse à cette question est oui ou non!

www.inaturalist.org